Numéro spécial : réapprendre à cuisiner pourrait devenir un acte de santé
publique.

Édito

La transition nutritionnelle est une des causes explicatives de la montée de l’obésité et de la croissance de l’ensemble des maladies non transmissibles. Bernard Maire, Francis Delpeuch et Michelle Holdsworth (page 3) nous expliquent les mécanismes de la transition nutritionnelle et nous développent la notion d’environnement obésogène, dans lequel désormais nous vivons et mangeons. Ils définissent cinq période de l’histoire alimentaire de notre civilisation : celle de la cueillette, celle des famines, puis celle de la récession des famines, enfin celle de la surabondance alimentaire et de ses maladies dégénératives liées (ère actuelle). Ils observent l’émergence d’une cinquième ère, à peine amorcée, qui pourrait être l’ère de l’alimentation préventive. Cette ère nécessiterait des changements de comportements alimentaires importants.

Des chercheurs en nutrition aux médecins, du Ministère de la Santé à l’OMS, en passant par l’Union Européenne…. tous considèrent que nous ne mangeons pas suffisamment de fruits et de légumes. Des campagnes de sensibilisation et d’information ont été menées et malgré tout la consommation des fruits et légumes n’est toujours pas à la hausse. Une étude récente Ifop (juin 2005) nous montre que 98 % des français pensent qu’il est important de manger des fruits et des légumes, dont 70 % qui pensent que c’est très important. De plus, 55 % savent qu’il faudrait en consommer entre 5 et 10 par jour (et 64 % pour les femmes). Mais la consommation des français n’augmente pas !

« Savoir » ne veut pas dire « Agir » !
Et en matière de prévention de la santé par l’alimentation, il en va de même qu’en matière de prévention du tabagisme. La connaissance ne suffit pas à faire changer les comportements. D’autres types d’actions sont nécessaires : certaines mesures doivent modifier l’environnement, ce qui relève majoritairement du Législateur, d’autres relèvent de démarches plus personnelles. Christian Rémésy (page 2) plaide pour une démarche préventive militante : une volonté personnelle de se ré-approprier son alimentation par un retour nécessaire à la cuisine. La surabondance des produits industriels transformés nous a éloignés des fondamentaux de la nutrition, comme elle nous a éloignés de nos « fourneaux ». Retrouver le chemin de la pratique culinaire et de la préparation des repas à base de vrais aliments, tel est son acte militant : un acte culinaire !

Le passage de l’ère des « produits prêt à manger » à l’ère de l’alimentation préventive passe inévitablement par un retour à la pratique culinaire. Eric Birlouez (page 4) nous trace le chemin du ré-apprentissage de l’acte culinaire, qui nécessite de rétablir le lien entre le Mangeur et ces aliments. Il apparaît donc que si « trouver son alimentation » est devenu très facile pour l’homme du 21ème siècle, en revanche, « savoir préparer de vrais repas » à base de vrais aliments est devenu un vrai challenge.

APRIFEL s’attachera au cours des mois à venir à trouver des solutions pour redonner au Mangeur le goût de cuisiner des vrais aliments. Et à travers Equation Nutrition, nous vous informerons régulièrement de l’avancée de notre nouveau chantier. Et si « lutter contre l’obésité » passait par « cuisiner plus » ?

A vos fourneaux !


Ensemble, luttons contre l’obésité !

CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS DE LA TROISIEME ÉDITION DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE EGEA, SUR LES BENEFICES SANTE D’UNE ALIMENTATION DE TYPE MEDITERRANEEN Rome, 18 – 21 mai 2005
Au cours de cette troisième édition d’EGEA intitulée « De la Science à l’Action », plus de 200 scientifiques et personnalités de Santé Publique, internationaux, ont présenté leurs travaux sur les bénéfices santé d’une alimentation équilibrée, riche en fruits et légumes et ont réfléchi à la mise en place de stratégies efficaces de prévention des maladies chroniques non transmissibles (cancers, maladies cardiovasculaires, obésité, diabète…).

Les travaux présentés confirment l’implication des facteurs nutritionnels dans le risque ou la protection vis à vis des grandes maladies non transmissibles de notre époque. De nouvelles études confirment notamment le rôle protecteur des fruits et légumes aussi bien sur les cancers, le diabète gras, que les maladies cardio-vasculaires.

EGEA 3 a mis l’accent sur des pistes de recherche sur les facteurs alimentaires de l’obésité et plus particulièrement sur les bénéfices d’une consommation importante de fruits et légumes sur l’obésité et le contrôle du poids. Les fruits et légumes frais, naturellement riches en micronutriments et pauvres en calories, sont un moyen de lutter contre l’offre alimentaire sur-calorique, l’augmentation de la taille des portions et la fréquence croissante des prises alimentaires (snacking). Cependant, si les causes de l’obésité sont plurifactorielles l’élément déterminant reste l’environnement. Et, l’information nutritionnelle ne suffit pas, des actions concrètes sont nécessaires !

Lors du congrès EGEA des exemples d’actions concrètes ou politiques gouvernementales qui ont montré leur efficacité ont été présentées: Ainsi, en Finlande, une politique nutritionnelle instaurée à l’échelle nationale au début des années 70, a entraîné en 30 ans, une réduction de 80 % du taux de mortalité par maladie cardio-vasculaire chez les hommes de 35/64 ans et une baisse de 58 % du diabète de type 2. Et la consommation de fruits et légumes a plus que doublé en 20 ans ! EGEA a démontré que seule une volonté politique forte permettra d’avancer dans le combat contre l’obésité, par une modification globale de notre environnement « obésogène ».

Laurent Damiens
Directeur d’Aprifel, France
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